2 000 pages de minutes qu'il fallait nécessairement sélectionner, ciseler, trier. Les mots du procès ont cette vertu qu'ils témoignent pour toujours.
Ils font figure de lieu de mémoire. L'oeuvre est là, précieuse, complexe et massive. Cette masse n'est pas inerte. La cruauté des paroles, les certitudes assénées, le mépris de la vérité perturbent le lecteur. En tout point, le procès de Dreyfus devant le Conseil de guerre de Rennes est un formidable révélateur. D'abord, des dysfonctionnements de la justice militaire. Ensuite, de la prévalence du culte de la haine sur celui de la raison. Même en temps de paix, l'exception, la dialectique " ami-ennemi ", la raison d'Etat l'emportent. La vérité éclate mais ne triomphe pas. Le bouc émissaire est sacrifié, l'erreur est démontrée, non corrigée. Le maître mot fut pour nous de respecter le rythme et le déroulé des audiences, garder la théâtralité au drame qui se jouait. Le procès devait demeurer vivant. Ont été reproduits les pièces présentées au procès, les témoignages, de même que le réquisitoire et la plaidoirie finale. Y figure le récit de la fameuse " scène de la dictée " organisée par du Paty de Clam avec l'idée préconçue d'avoir déjà le coupable entre ses mains... Jean-David Dreyfus