En dépit de ses engagements politiques, dont sa réputation a porté le poids, carl schmitt apparaît aujourd'hui comme une des figures majeures de la pensée politique du xxe siècle, dont l'influence souterraine s'est exercée en profondeur, en particulier sur la réflexion constitutionnelle.
Dans sa théorie, la théologie politique est une pièce essentielle pour l'interprétation de la nature du politique : " presque tous les concepts prégnants de la théorie moderne de l'etat sont des concepts théologiques sécularisés. " le dieu tout-puissant est devenu le législateur omnipotent ; la " situation exceptionnelle " a finalement pour le droit la même signification que le miracle. de ce vaste transfert, le grand juriste et philosophe souligne les implications et les conséquences pour l'évolution des sociétés modernes.
Sous ce titre, sont réunis deux essais écrits à près de cinquante ans d'intervalle, 1922 et 1969. le premier contient, entre autres, le chapitre sur la souveraineté, dont la première phrase - " est souverain celui qui décide de la situation exceptionnelle " - est devenue célèbre. le second est une réponse aux critiques de toute théologie politique inspirée du christianisme, critiques développées en 1935 par le théologien erik peterson et reçues depuis lors comme un dogme.
Pourquoi les espoirs, toujours renaissants, de voir enfin la démocratie s'épanouir dans un pays musulman sont-ils sans cesse déçus? Pourquoi le pluralisme des opinions, le respect des minorités, la libre critique font-ils autant question en terre d'islam? Au-delà des accidents de l'histoire et du jeu des forces politiques, tout un rapport au monde est en cause, marqué par la fascination pour la certitude, le désir d'obtenir une unité qui sans cesse se dérobe, la crainte de la division. Le Coran évoque à tout moment les preuves incontestables face auxquelles il n'est de choix qu'entre la soumission des croyants unanimes et le refus haineux d'infidèles honnis de Dieu. La philosophie islamique célèbre une certitude reçue d'en haut et le règne d'un bon pouvoir, loin des débats obscurs de l'agora. Le droit islamique est en quête de sources inspirées dont Dieu serait le garant. Dans un tel univers, comment les doutes, les divisions, les tâtonnements d'une démocratie pluraliste pourraient-ils prendre sens? Comment sortir du rêve d'un pouvoir du peuple uni dans la magie du consensus? Comment ne pas rejeter ceux qui sèment le doute? Explorer dans ses profondeurs l'univers mental de l'islam renouvelle le regard sur les impasses d'aujourd'hui et permet de mieux percevoir à quelles conditions le monde musulman pourrait se réconcilier avec la démocratie.