Il est d'usage de parler de la langue de Shakespeare. Cet ouvrage démontre qu'on pourrait tout aussi bien parler du droit de Shakespeare. Poète national qui forge le roman politique et juridique de la nation anglaise au tournant de la Renaissance, Shakespeare est l'archétype de ces « législateurs cachés » dont parle Shelley. Souvent cité aujourd'hui encore par la Cour suprême des États-Unis, Shakespeare traite quelques-unes des questions juridiques les plus fondamentales : entre l'esprit et la lettre de la loi, équité et formalisme juridique, que choisir ? De quelle légitimité les princes peuvent-ils se prévaloir ? Entre le vrai, le faux et le vraisemblable, où passe la vérité légale ? Les lois pénales sont-elles faites pour être appliquées ? Entre vengeance et pardon, comment équilibrer la balance de la justice ? Ces questions, Shakespeare ne les traite pas à la manière d'un manuel de droit ; il les performe par la grâce du théâtre. Ses pièces sont des laboratoires des passions juridiques ; le faux est traqué derrière les apparences, et l'injuste dénoncé sous le légal. Réalisant un parcours buissonnier dans une oeuvre monumentale, cet ouvrage s'attarde sur six chefs d'oeuvre dont l'éclairage juridique révèle des dimensions insoupçonnées : Le Marchand de Venise, Mesure pour mesure, Richard II, Jules César, Hamlet, et Le Roi Lear. Dans le cercle magique du théâtre du Globe, c'est l'humanité entière qui est convoquée ; et dans le creuset bouillonnant du théâtre élisabéthain se joue une formidable Comédie de la Loi qui accouche de notre modernité. Contribution essentielle au courant « droit et littérature », cet ouvrage, le premier en langue française à aborder Shakespeare sous l'angle du droit, pourrait bien également renouveler durablement les études shakespeariennes.
Tout au long de son existence, Franz Kafka (1883-1924) vit un conflit entre la nécessité de se conformer aux règles de sa communauté et les exigences de la vocation littéraire. Chaque étape de sa vie privilégie tantôt les attentes de la Loi commune, tantôt l'appel de l'écriture. Sans choisir véritablement, il apprend à vivre dans une « zone frontière entre la solitude et la vie en commun ». Jusqu'à sa mort, il ne cessera d'osciller, non sans déchirements, entre ces deux mondes.
Son oeuvre exprime la radicalité de cet antagonisme. L'exclusion de ses personnages hors de la Loi est brutale. La condamnation qui les frappe est définitive. La scène judiciaire qu'ils appellent de leurs voeux est le moyen de contraindre cette violence sans langage à se justifier. Malgré ce sort funeste, ils espèrent être reconnus. Placés au seuil d'une Loi qu'ils ignorent autant qu'elle les ignore, ils cherchent jusqu'à l'épuisement la justification de leur exclusion. Nul échec ne les dissuade d'espérer une place parmi les hommes.
Quel est le sens de ces assauts que lancent ces exclus, doubles de l'auteur, pour arracher leurs droits ? Qu'espèrent-ils en cherchant à interpeller les maîtres anonymes du Tribunal ou du Château ? Sont-ils voués à l'échec ou leur capacité de résistance est-elle la vraie, la seule finalité de leur combat ? Le crépuscule de la Loi auquel ils assistent est-il la fin d'un monde ou le commencement d'un autre ?
Pourquoi l'étude des rapports entre droit et littérature est-elle quasi inexistante en France alors que la tradition littéraire y est si riche ?
Ce livre veut réparer cette incogruité en s'intéressant à la façon dont l'un interfère sur l'autre, le nourrit et le pense.
Lafiction traite sans ménagement les grandes institutions juridiques et réinvente à sa manière le contrat, la personnalité juridique ou la loi.
La littérature, que ce soit dans "Les frères Karamazov" ou "Les Sorcières de Salem", s'empare de la dimension dramatique du procès, qui éclaire l'éternelle confrontation de l'homme et de la loi. Et l'écrivain, de l'affaire Callas à l'affaire Dreyfus, refuse d'assister, impuissant et révérencieux aux injustices de son temps.
La littérature s'approprie le monde du droit, récrée ses personnages, s'efforce d'imaginer la loi.
Cet ouvrage, qui restitue les travaux d'un colloque organisé à la Cour de cassation par l'Institut des hautes études sur la justice, l'Association française pour l'histoire de la justice et l'Ecole nationale de la magistrature vient du droit et de la littérature initié par la collection "Le Bien commun".
Albert Camus entretient un rapport paradoxal à la justice selon qu'il y voit un idéal d'équité ou une machine destructrice d'innocence.
Depuis ses premières expériences comme chroniqueur judiciaire à Alger jusqu'à ses écrits contre la peine de mort, l'oscillation est constante. Comme institution, la justice est captive des idéologies ou des passions, mais comme quête morale elle incarne une " juste révolte " contre l'injustice. Sous le masque de Caligula, elle est source d'une ivresse barbare et démesurée. Mais sous les traits apolliniens de Nemesis, déesse de la mesure, elle est lumière.
Camus pense inlassablement la justice contre elle-même. Il combat ses dérives justicières autant qu'il lui rappelle sa vocation à fonder une cité juste. Ses fictions sont des masques autobiographiques qui creusent en profondeur le sillon de cette tension.
"Ce qu'il y a de plus horrible au monde, c'est la justice séparée de la charité." Pour Mauriac, une justice sans charité n'est que la forme institutionnalisée de la loi de "l'entre-dévorement". La justice des hommes est trop souvent celle de Pilate si elle n'est rendue qu'au nom des hommes.
Pour qu'une vraie justice puisse être fondée, il faut admettre l'existence du mal au coeur de l'humanité et méditer en conséquence ce qu'il en est de l'homme. La justice, dès lors, appelle son parachèvement par une charité qui est d'abord synonyme d'humanité.
C'est pourquoi il n'y a pas pour Mauriac de question politique plus haute que celle de la justice. Répondre à son appel, c'est contredire le mal.
C'est de la profondeur de sa pensée sur la justice, nourrie par l'écriture romanesque, que Mauriac tira la justesse de vue qui marque son fameux "Bloc-notes" et fit de ce bourgeois catholique et conservateur l'une des voix les plus écoutées de son temps. Face au siècle, Mauriac maintient une double exigence qui, plus que jamais, en fait notre contemporain : juger la politique au nom de valeurs qui ne sont pas politiques, et refuser la politisation de ces mêmes valeurs.
En termes d'innovation, la France et l'Europe ont accumulé un retard significatif vis-à-vis de la Silicon Valley, mais aussi de la Chine. Or, d'ici à dix ans, l'innovation va générer 1210 milliards de dollars dans le monde avec, à la clef, 20 millions d'emplois.
Pour savoir où se trouvent ces 1210 milliards de dollars et, surtout, comment et dans quelle mesure s'en emparer, Guillaume Villon, fort de son expérience, livre recettes et méthodes afin de répondre aux questions suivantes, destinées à tous les entrepreneurs, cadres d'entreprise ou investisseurs :
- Comment se positionner sur des projets d'innovation ?
- Comment élargir sa base de clientèle ?
- Comment choisir la bonne équipe, afin de faire diminuer le nombre d'investissements ?
- Quelles sont les compétences-clés pour le monde de demain ?
- Comment piloter la transformation digitale ?
Où est le droit dans une oeuvre dont l'imaginaire utopique a pour devise : "Fais ce que tu voudras" Partout: il est peu d'univers aussi normés que celui de Thélème, la célèbre abbaye du Gargantua.
Mais le triomphe de l'esprit sur la lettre, de la volonté bonne sur les chaînes de la discipline y a consommé jusqu'à la nécessité de publier les lois. Depuis longtemps déjà, la satire d'un droit encombré de gloses et de procédures paperassières avait placé les personnages de Rabelais sur le chemin d'une loi plus maigre. Plus de nerf et moins de chair, pourraient dire ces nostalgiques de l'âge d'or, dont l'économie normative semble faire écho à notre libéralisme politique.
Loin d'une magistrature corrompue et des vaines subtilités de l'Université se dessinent les contours d'une pensée qui ne mérite pas sa réputation d'anti-juridisme joyeux.
Les bombances légendaires des géants y sont moins l'expression d'une culture carnavalesque qui suspendrait l'exercice des normes, qu'une scène éminemment politique. La convivialité de la table assigne les hommes à un exercice de reconnaissance réciproque qui libère l'échange, la confrontation pacifique et le dialogue, sans nier les passions : le pantagruélisme est une philosophie à visage humain.
Mais l'histoire est là, qui rôde comme une menace autour des utopies rabelaisiennes. Panurge lui-même, l'auxiliaire bouffon de ces histoires, connaît la tristesse et la peur, les accès de violence, l'irrésolution. "Vivez joyeux", répètent à l'envi les bons pantagruélistes. Mais l'adage ne peut faire illusion : il n'est pas simple de vivre ici-bas. Il faut donc bien faire la guerre, il faut donc bien guérir, il faut donc bien juger.
À la croisée de l'optimisme humaniste et du réalisme politique, d'un pacifisme évangélique et d'une philosophie de l'action, Thierry Pech montre que la Cité rabelaisienne s'érige entre deux hautes figures du XVIe siècle : Erasme et Machiavel.
« Je répète bien souvent que la plupart des affaires des procès d'assises recèlent toutes les composantes de la tragédie. Les actes les plus désespérés reproduisent l'histoire des amours interdites, des haines qui consument, des trahisons, délations, mensonges et lâchetés qui font l'irréparable. Parfois, au plus noir de la nuit, se dessine en clair-obscur le profil du héros, un éclat de soleil qui déguise les ombres en personnages de roman, quand le courage et la dignité pétris de souffrance transforment le passage à l'acte criminel en chemin vers la transcendance.
Un jour, dans le prétoire, j'ai rencontré une femme. C'est son histoire que je vous conte aujourd'hui. » Peut-on tuer son père lorsque l'on a été sa proie ?
Tragédie contemporaine, récit d'un parricide - Luc Frémiot nous fait revivre une affaire hors norme. Un livre fascinant, inspiré d'une histoire tristement réelle, porté par un souffle romanesque qui nous entraîne fatalement jusqu'au dénouement final.
Juriste de formation, abbé de son état, lexicographe par passion, Antoine Furetière, l'un des Quarante de l'Académie française, en fut honteusement expulsé en 1685 pour avoir outrepassé le monopole royal dont bénéficiait l'Académie en matière de dictionnaire. En 1690, il publia son Dictionnaire universel, dont la modernité lui valut un succès immédiat. L'enjeu de cette « querelle des dictionnaires » n'est pas mince : le choix entre la méthode puriste de l'Académie qui vise à fixer un état aristocratique de la langue, à l'image de l'ordre versaillais, l'épurant de tout néologisme, et l'approche critique et savante de Furetière qui rappelle que la langue appartient à tous, qu'elle s'enrichit avec le temps, et que la fixer c'est l'étouffer. Son combat pour le libre parcours de la langue et donc des idées reste plus que jamais d'actualité, à l'heure où menace la privatisation des informations et des connaissances.