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SKA
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Une fille ravissante, un jeu de séduction et un mystérieux secret à la révélation fatale qui tranche dans le vif du sujet...
Je suis mort ce matin. Tout doucement la vie m'a quitté, le sang s'est écoulé, mon coeur de battre s'est arrêté.
Je l'ai mérité.
Un an plus tôt.
Comme chaque matin, je descendais les deux étages de mon immeuble. Je partais pour une longue journée de labeur un sac poubelle à la main que j'abandonnais lâchement dans un container sur le trottoir. Des effluves nauséabonds me montèrent au nez, déchets des habitants de tout un bâtiment. Des jeunes, des vieux, des grands, des petits, des gros, des minces, des soignés et des crados. On se connaît un peu, on se fait signe parfois, un hochement de tête, un petit sourire à peine ébauché, rien de plus. Pas d'apéros entre voisins, rien. Triste constat. Je tournai au coin de la rue, le temps était plutôt agréable et la température clémente. Nous étions en avril, les arbres commençaient à fleurir. Cette perspective me mit en joie et c'est avec bonne humeur que je pénétrai dans l'estaminet où chaque matin Francis me servait un café. [...]
Quand des faits très anciens brûlent toujours la mémoire de celle qui les a subis alors que leur auteur a tout oublié, presque tout, la pulsion vengeresse vous étouffe, à moins qu'un simple ustensile vienne vous libérer... Odile Marteau-Guernion emprunte la voie noire avec conviction et talent... -
Big Data, réseaux sociaux, des dangers réglés à la manière N... N comme Nettoyage à sec... d'une impitoyable efficacité...
[...] Il s'assied, désactive le mode avion de son portable. Rapide check des nouvelles sur le fil d'actualité de Libé.fr. L'appli s'ouvre sur la photo d'un homme d'une cinquantaine d'années, type caucasien marqué, yeux en amande, teint blafard, barbe naissante poivre et sel. « Yaroslav G., directeur général de FaceApp, sauvagement assassiné devant son domicile parisien. »
Il clique, parcourt l'article en diagonale. 3h du matin. Seizième arrondissement. Pied à terre parisien. Le russe brûlé vif. Garde du corps abattu (sniper ?). Acte signé d'un grand N tagué à la peinture jaune sur le trottoir. Vidéo agression postée sur Snapchat. Virale...
Dans la collection «Il est N », Nils Barrellon signe le #4. Où N affronte les voyous du net. À sa manière décapante. S'il est possible de l'approcher, le pister n'est pas sans danger. -
Personne ne l'a vu, personne ne le connaît. Violent, dangereux, il est le mal incarné, il est l'ennemi public N°1...
Quand la porte encadre ce beau mec avec ses boursoufflures musculaires appétissantes sous son t-shirt siglé « J' aime Le Havre », je lui cale dans les dents :
- Ça urge, panique maxi au sommet, j'ai besoin que tu m'allumes de tes lumières.
C'est un type réglo, et pas compliqué, il se désape recta. Un petit cul musclé d'enfer et une teub à tomber à genoux. Un profileur de ce gabarit, elle n'est pas née celle qui voudrait me le dérober. L'avantage, avec Jmamba, c'est son mode de réflexion, la forme de sa cogitation, le lieu d'extraction de ses intuitions. Il possède un mode opératoire pas banal. Pour émulsionner sa cervelle en vue de profiler les criminels, il a besoin d'une sieste crapuleuse à l'issue de laquelle ses idées naissent dans les volutes de sa Pall Mall. C'est le genre d'exercice intellectuel propice à contenter, et ma libido, et mon professionnalisme. Je n'ai pas le temps de lui faire un topo de la situation qu'il est déjà au lit, chapiteau dressé, les bras tendus vers moi dans une prière touchante et un voussoiement hiérarchique qui m'électrocute :
- Henriette, auriez-vous l'obligeance d'agiter mes grelots ! Le pays est au bord de l'implosion. Depuis quelques semaines un ennemi public se déchaîne, les attentats sanguinaires qu'il commet se multiplient. Les médias le surnomment la « Bête » tant la bestialité de ses crimes qu'elle signe d'un grand « N » traumatisent l'opinion. L'agente spéciale Bulot est chargée de « traiter » la « Bête » avec l'aide de Jmamba, le profileur spécialiste de la traque des humanoïdes déréglés. Le cortex de « N » aurait-il été hacké, transformant ce brave petit soldat du capitalisme mondialisé en soldat de l'« e-monde » ? La chasse à « N » est ouverte !
« Il est N » est une collection de récits courts, noirs, inscrits dans notre époque. Périodiquement un nouvel épisode du feuilleton par un nouvel auteur. Jérémy Bouquin qui a créé cette série dans l'esprit des feuilletons de la grande époque de la littérature populaire renoue avec l'esprit du mauvais genre. N serait-il un nouvel avatar de Fantômas qui aurait mangé du Poulpe enragé ? Max Obione a l'honneur d'ouvrir la série, d'autres auteurs piaffent pour apporter leur contribution de chaos et de fureur.
Version papier sur la librairie de TheBookEdition. -
La perte d'un enfant à cause d'une babiole avalée a de quoi rendre une mère incontrôlable.
« La mère ne s'est probablement pas absentée plus de deux minutes. Le temps de fouiller dans le bureau ou dans les tiroirs et d'embrasser une dernière fois son mari ? Un temps suffisant toutefois pour que Florence arrache le mouflet à son rehausseur, une main plaquée sur sa bouche pour l'empêcher de donner l'alerte. De toute façon le gamin était tellement surpris que sur le coup, il n'a même pas pensé à gueuler. C'est après que l'idée lui est venue. - Qu'est-ce que tu fais, on ne va quand même pas enlever un enfant ? »
Valérie Bernon nous livre une nouvelle d'une noirceur totale correspondant parfaitement à la collection. L'enchaînement des causes conduisant au dénouement dramatique comprend tous les ressorts de la nouvelle noire où s'ébattent les destins ordinaires livrés au hasard fatal.
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Quand la frustration active une passion dévorante pour les voitures miniatures comme autant de cailloux blancs dans sa mémoire...
« Il était fier de sa collection de voitures miniatures, des « Dinky Toys », des Américaines pour beaucoup. Elles étaient rangées sur une étagère en verre. J'aimais particulièrement une Cadillac jaune, je la prenais dans ma main pour l'observer sous toutes ses coutures. Mais il s'énervait si je ne la remettais pas à sa place rapidement. Il était bizarre : je n'allais pas lui manger ses bagnoles ! »
Gérard Salin apparaît pour la première fois au catalogue de Ska. Ecriture subtile, des mots justes pour un univers humainement sombre.
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Une histoire étrange où le modus operandi révèle un appétit féroce chez une géante insoupçonnée...
« Je l'ai vu tirer ses six coups dans une foule d'hommes qui le bousculait pour l'entraîner dans le bar de Simpson, alors qu'une danse était en train. Une autre fois, il planta son couteau de chasse dans Tom Hooper, parce que celui-ci lui avait renversé par mégarde son verre sur le gilet. Non, il ne reculait pas devant un assassinat, Joe, oh non, et il ne fallait pas lui faire confiance tant que vous n'aviez pas l'oeil sur lui... »
L'oeuvre d'Arthur Conan Doyle ne se résume pas aux enquêtes de Sherlock Holmes. Parmi ses ouvrages, de nombreuses nouvelles révèlent son génie de conteur. Il y excelle dans le crime étrange.
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Le fait divers est un matériau brut utilisé abondamment par les raconteurs d'histoire... Les auteurs SKA s'en délectent !
« Le fait divers, c'est le récit d'aventure du pauvre... Le fait divers, c'est les dessous toujours un peu crasseux : les petites culottes sales, les draps tachés. C'est parfois la tristesse mais aussi l'absurde. Parfois jusqu'au grotesque. C'est la rencontre de ce duo qui tourne souvent mal : l'argent et le sexe, surtout s'il s'y ajoute le troisième, l'intrus fatal : le pouvoir... Mais le fait divers est aussi l'ami des rêveurs, des écrivains qui, puisant leur plume dans les délits de leurs contemporains, en tirent une soie moirée, chatoyante à la lumière des projecteurs se braquant dessus... » (extrait de la préface de Jeanne Desaubry)
Voici les auteurs : Gérard Streiff, Franq Dilo, Michel Baglin, Max Obione, Jeanne Desaubry, Patrick Bent, Annouk Langaney, Nigel Greyman, Aline Baudu, Linne Lharsson, Pascal Jahouel, Roland Sadaune et Paul Colize
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Deux enfants, deux époques différentes, une même course effrénée pour échapper à à la barbarie...
« Déjà la foule les cherche du regard. Un gendarme les pointe du doigt. Sans réfléchir, Simon se détourne. Moussa se carapate sans demander son reste... Moussa court, Simon court. Leurs coeurs cognent dans leurs frêles poitrines. Derrière eux, les claquements des bottes à bouts ferrés résonnent en un terrible écho à leur peur. De longues larmes strient leur peau, brouillent leur vue, dégoulinent jusqu'à leurs lèvres déformées en des rigoles de souffrance. D'un revers de manche, ils s'essuient les yeux. »
A travers le destin de deux enfants, Sébastien Gehan mêle les époques et les situations. Rafle des juifs durant la dernière guerre ou expulsions d'immigrants aujourd'hui, deux réalités non comparables, mais une même « barbarie » à l'oeuvre.
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Quand l'usure de la mémoire atteint Nettie, il est temps pour Georges de regretter son premier amour...
« Nettie ne se souvient plus que le repas est déjà dans le four. Alors elle prend un autre plat et dispose à nouveau les couches de légumes, de viande hachée, avec un peu de crème et de fromage râpé. Nettie refait les gestes qui la rassurent. Au moins n'est-elle plus en train d'essayer de se rappeler. Georges secoue la tête. Bien sûr que non, elle ne se souviendra pas de la promesse d'il y a cinquante ans. Au fond, il a bien fait de les appeler. Qu'ils viennent le plus vite possible, ça ne peut pas durer. C'est trop douloureux de la voir comme ça. »
Valérie Allam possède la faculté d'embarquer le lecteur sur des voies étranges, où le réel n'est jamais vrai, où le mystère est une autre forme de réalité. Le faux semblant est ici manié avec la maestria d'une nouvelliste de grand talent.
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Un bon Bouquin, ça mérite qu'on en redemande ! Alors cette compil' est la bienvenue...
« Augusto est là. Posé à sa table. Il déguste un jus. Un noir, serré, pur arabica, sans sucre. Il s'en balance une dizaine dans la journée. Il passe ses journées au turbin, là, dans ce rade. Il n'a pas de boulot officiel, pas de vie, pas de compte en banque. Augusto ressemble à un maquereau. Il a tout de ces gars qui tiennent les putains sur les trottoirs. Godasses à dix mille. Cheveu ravalé, gominé, gras, la petite moustache, le pantalon moule bite, la veste en cuir et une chemise noire ouverte sur un torse imberbe. Une tapette. »
Jérémy Bouquin s'impose au fil de ses publications, ses nouvelles noires radicales éditées chez SKA réunies dans cette compilation illustrent son talent... -
Une immersion au coeur d'un duel sans merci où le lecteur est interpellé par l'auteure, entre fiction et réalité...
« L'homme s'est arrêté de parler et de marcher et s'est laissé tomber dans le fond du hangar, dans le noir. Votre coeur bat encore de ses mots, des images qu'il a fait surgir et de son désespoir qu'il vous a communiqué. Puis votre attention se reporte sur la femme. La compassion que vous éprouviez un peu plus tôt pour sa situation s'est considérablement amoindrie. Bien au contraire, l'histoire que vous venez d'entendre vous a empli d'une épouvante qui a mué votre commisération en quelque chose qui ressemble maintenant à de la haine. »
Isabelle Letélié nous offre une nouvelle qui rend le lecteur complice et spectateur de l'action qui s'y déroule, la chute vous en donnera les raisons. Original et bougrement efficace.
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Quatre ados boutonneux, une fille endormie, vulnérable, un joint qui passe... des désirs refoulé. Lentement l'angoisse monte.
[...] On a allumé le pétard ; alors que Teddy aspirait une bouffée, on a entonné« Joyeux anniversaire ! Joyeux anniversaire ! » Puis nous nous sommes exclamés« Un bisou ! Un bisou ! » Teddy n'avait pas encore recraché la fumée il a saisi Rachel par les hanches et forcé un accès à ses lèvres avec un sourire farceur. Elle a toussé quand la fumée a pénétré dans sa gorge mais elle a aspiré. Teddy a remis ça trois ou quatre fois. On a crié« Ouaiiis !!! » Rachel a fini par saluer d'une révérence comique de danseuse étoile. On a pris chacun une petite taffe. Rachel a demandé à Teddy si elle pouvait aller s'allonger dans sa chambre, parce qu'elle se sentait un peu bizarre. »
La tentation, la mauvaise idée, le danger, et personne pour oser dire non... Ou comment la spirale étouffante mène au drame.
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Histoire tranchante d'une femme criminelle au désespoir de l'hiver des sentiments...
« ...elle laisse la porte grand ouverte pour profiter de la clarté de la lune. Le panier de bûches est prêt, ainsi qu'elle l'a demandé à Raymond. La hache ne dépasse pas, comme elle le lui a recommandé. Elle se penche pour en éprouver le tranchant, qu'elle devine à peine entre les rondins de charme. Sa main rencontre la lame et elle pousse un petit cri. Son pouce est légèrement entaillé et elle le porte à sa bouche pour aspirer la goutte de sang qui y perle. Elle est satisfaite, la besogne se fera facilement. »
C'est âpre, froid, désespéré. Terrible tableau brossé avec talent par Etel, que ce destin de femme criminelle s'étant délivrée de son insupportable condition. -
Engrenage mortel de la vengeance. On ne se libère pas aussi facilement de la tradition familiale quand les racines sont en Sicile... « Quand Giulia sort de l'hôtel, après son client, la nuit est tombée et l'air commence à se rafraîchir. C'est le seul moment ou elle prend plaisir à déambuler dans ce quartier de Grenoble. Elle se dirige vers la brasserie où tous les soirs elle prend son repas. En passant devant une vitrine elle fait bouffer ses cheveux, rajuste la lanière de ses sandales ; trouver le temps d'aller chez le cordonnier devient urgent.Il est vingt trois heures, la vie des noctambules va commencer et elle a une heure rien que pour elle. C'est déjà çà, dit la chanson. » Cette nouvelle, fruit d'un atelier d'écriture dirigé par Jeanne Desaubry et organisé par l'association « Tu connais la nouvelle », illustre le thème « Famille, je vous Haime ».
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Effectuant l'intérim de son époux, la Mère Noël tombe sur Sam à la langue bien pendue...
« Ce mouflet, il a l'air plutôt intelligent et sensible malgré les apparences : « Autrefois, à Noël, la maison sentait les raisins qui trempent dans le rhum. La mère faisait toujours cuire un cake le matin, il y avait l'odeur du sapin et celle du feu de la veillée... Elle n'a pas été ramonée depuis longtemps, cette cheminée !
- On l'a jamais allumée.
- Je vois. »
S'il y a des nuances de gris en littérature noire, la nouvelle de Manon Torielli serait d'une nuance « gris clair ». Le dialogue entre la Mère Noël et ce gamin déluré déroule une musique triste ragaillardie par la perspective de jours meilleurs.
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Le réveillon d'Angélique et Bernard ou la nuit des faux-semblants se déroule en 5 actes avec une « surprise du chef ».
« Bernard, commença Angélique, je voudrais porter un toast. Son mari leva les yeux, comme surpris de sa présence. Son regard morne vint se poser sur elle tandis qu'une miette de foie gras pendait lamentablement à la commissure de ses lèvres.
- Je voudrais lever mon verre, poursuivit-elle en joignant le geste à la parole, à la vie de merde que tu m'as fait mener. »
Le talent d'Isabelle Letelié nous est donné en cadeau avec cette nouvelle de Noël. Un conte en trompe l'oeil, en perspectives faussées, et une chute pas piquée des vers.
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Entre Raqqa et Bruxelles, les âmes perdues du djihad vont châtier les kouffar (mécréants)...
« Un dernier doigt d'honneur à cette putain de Belgique qu'ils haïssent, ses pétasses blondes et grasses refusant de se faire basculer, sa jeunesse hystérique et dépravée, américanisée. Farid a juré sur le Coran. Si Djellal tombe, il mettra le plan à exécution. Leur plan. Asymétrique. Fulgurant. Imprévisible. Une oeuvre d'art. Une installation. Djellal se bidonnera au paradis, matant l'hécatombe sur écran géant entre deux coups de chibre dans une vierge céleste. Farid se marre tout seul comme un con, ouvre la fenêtre, propulse la cigarette d'une pichenette dans la cour pavée. Rira bien qui rira le dernier. » "La vengeance est un plat qui se mange halal. Entre Raqqa et Bruxelles, les âmes perdues du djihad vont châtier les kouffar sans verser une goutte de sang, frappant au hasard, utilisant les points faibles de l'Occident : son insatiable soif de plaisir et sa létale propension au désespoir."
Damien Ruzé : un ton, un rythme, une prosodie si noirs qu'on pourrait s'y égarer à jamais. À lire de toute urgence, ce texte écrit en janvier 2016, violemment prémonitoire.
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La circulation automobile à Marseille a des caractéristiques frappantes...
« Il freine brutalement, et s'arrête tout juste. Un peu plus et il s'encadrait dans la portière du mec, qui l'engueule. Il voit la face congestionnée d'un pépé de mauvaise humeur, il a eu très peur. Il rigole : « Alors Pépé, t'as fait dans ton froc ? Il recule rapidement pour ne pas se trouver sur la file de gauche quand le feu repassera au vert, le conducteur de la bagnole qui le suit lui balance des appels de phares. - Fais chier ! » Il exhibe un magnifique bras d'honneur. »
Gilles del Pappas brosse un portrait sans fard de certains travers observés dans la cité phocéenne, « comme si vous y étiez », avec l'accent et les mots pour le dire. Comme il est marseillais, on ne peut le suspecter de préjugé. -
Le fils du tueur, tueur lui-même, doit honorer un contrat, et qu'importe la cible...
« La chambre était plongée dans une demi-obscurité à peine égayée par la lueur rougeâtre de la lampe de chevet et par les quelques rais de lumière blanche qui s'échappaient des volets ajourés des deux fenêtres, zébrant les murs et les meubles. Une odeur indéfinissable flottait dans la pièce, un mélange de papier moisi, de camphre et, étrangement, de noisette grillée. Il s'avança dans la chambre d'un pas hésitant puis s'approcha du lit... »
Gilles Vidal conduit le lecteur vers une cible qui se dérobe. Mortel !
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Les champignons hallucinogènes en guise de pâtée pour toutou ont un effet dévastateur...
« J'arrive pas à croire que Totor soit mort. » Hélène a lancé ça à table. Au milieu d'un apéritif dînatoire, évoquer notre chien, ça fait bizarre. Ca jette un froid sur les invités, sur les parents et moi : on dirait que même les bulles du champagne s'arrêtent de pétiller. M. Vaudry se permet tout de même de lui rendre hommage : « C'était une brave bête », dit-il avec une gêne profonde. Papa fait comprendre à Hélène que ce n'est pas le moment, ce qui ne nous empêche pas d'embrayer sur ce sujet douloureux. Pendant quelques instants, nos langues se délient, et Totor apparaît comme un mirage gambadant au-dessus de nos fronts. On l'aimait, ce fichu chien ! Il était moche et comique, l'équivalent quadrupède d'un vieux pépé pantouflard et râleur en train de ronfler dans son fauteuil. »
Gaëtan Brixtel nous conte des mésaventures ponctuant la vie ordinaire. Des dérapages frisant le pire par un auteur dont la noirceur en demi-teinte ravira les amateurs du genre.
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Un ballon perdu sur la plage, la cruauté de la guerre comme horizon...
« Un cercle jaune illumine soudain un rideau de fer arraché, une porte défoncée, effleure brièvement sa burka. Razan se jette derrière des sacs de sable empilés et attend. Un pick-up chargé de quatre hommes en treillis, la barbe broussailleuse, roule au ralenti. Elle se tasse, la souffrance anesthésiée par la terreur, et ne relève la tête que lorsque le bruit du moteur s'est évanoui, puis elle cavale le long des ruelles, se fondant dans l'ombre des façades éventrées. »
Catherine Fradier nous livre un véritable « diamant noir » s'inspirant des drames vécus par les habitants du Moyen-Orient en guerre. Une écriture sans fioriture tranchant dans le vif des vies innocentes massacrées.
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Raffinement suprême pour les amateurs de boudin, s'offrir une « saignée » bien gore.
« - Vous la connaissez ? Il me fait. Je braconne depuis des années ! Je suis un des meilleurs chasseurs du coin. Un charcutier hors pair et il doute encore ! Je soupire. Monsieur Joseph juge un moment ma réaction. Je ne vais pas m'abaisser à lui répondre.
- Je veux du boudin ! Un beau boudin noir.
Je sais, je lui fais. Trois fois qu'il se répète. Il radote Monsieur Joseph. Et je veux voir la bête. Je sais ! Décidément. Quand ? Il s'impatiente. Je reprends ma photo. Je la fourre dans mon blouson. Demain soir ? Il accepte. Je lui donne alors l'adresse, celle d'une cave planquée dans le coeur d'une zone pavillonnaire. »
Le rythme et la texture de cette écriture noire vont si bien avec le boudin de même couleur que c'est à vous couper définitivement l'appétit. -
Acculé, sans ressort et sans espoir, le basculement fatal d'un homme perdu dans la France du chômage.
« - Il faut que tu ailles le chercher à dix-huit heures chez Nelly avant de prendre les grands à la garderie. Je rentre tard ce soir.
- J'ai rendez-vous chez l'cardio à quatre heures. Je ne sais pas si je serai sorti.
- T'as appelé mon frère pour le boulot dont il t'a parlé dimanche ? Son copain, il ne va pas attendre cent sept ans que tu lui téléphones.
- Je te dis que je vais chez le cardio et que je ne sais pas si je serai sorti.
- Mais t'as rien. Qu'est-ce que tu me prends la tête avec ça ! Arrête plutôt de jouer à la console et cherche du boulot. Ya six mois tu pouvais plus bouger à cause de ton dos, maintenant c'est le coeur. Et puis ce sera quoi après ? »
Cette nouvelle, fruit d'un atelier d'écriture dirigé par Jeanne Desaubry et organisé par l'association « Tu connais la nouvelle », illustre le thème « Famille, je vous Haime ».
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Simple d'esprit, elle donne son corps pour entendre les petites musiques du coeur, jusqu'à l'heure de sa revanche.
« Bâtarde ! C'est vrai qu'à la maison non plus elle n'avait pas de prénom. Le père l'appelait la bâtarde, la mère ne l'appelait pas. Bâtarde et attardée, « abâttardée »... Drôle de pedigree pour une drôle d'existence pas franchement plaisante. Heureusement que la Jeannette lui avait appris à voir la vie en Technicolor avec les petites musiques... »
Claire Rivieccio nous livre une novella d'une grande intensité due à la vérité de son personnage principal si bouleversant. Ecoutons la petite musique de cette auteure, elle recèle une mélodie narrative brillante.