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Paris 1969. Marc Elern a dix-huit ans. Il vient de perdre sa
mère. C?est dans un état second qu?il passe le bac, partagé
entre la douleur et la passion qu?il éprouve pour Alba,
jeune infirmière qu?il épie dans l?immeuble vis-à-vis du sien,
fenêtre dans la nuit. Pour elle, il veut quitter l?appartement familial
où il vivait avec son père et sa petite soeur Cathy, dix-sept ans,
aveugle de naissance. Pardonne-moi, j?ai rencontré l?amour...
Mais, éjecté du jardin vital de l?enfance, Marc est perdu. Le deuil
va faire de ce jeune homme inachevé un amoureux chronique,
hanté par le corps des femmes qui portent la vie, l?amour et la mort,
et dont la maladie, parfois, tue la beauté. Après Alba il s?éprend
d?Aline, trente-huit ans, divorcée, une jolie maman. Seule la mort
doit les séparer. Ils veulent fonder une famille à eux, mais Aline
ne tombe pas enceinte, et, détaché d?elle physiquement, Marc
finira par la quitter.
Il erre ainsi d?une femme à l?autre, d?un âge au suivant, enfant
toujours en quête du paradis premier, sa mère disparue sans
un mot d?adieu. Toujours en quête du grand amour... -
Il est amoureux mais incapable d'aimer.
Elle fait monter la pression atmosphérique, elle rend l'air suffocant.
Ils connaissent tous les trucs du jeu mortel qui consiste, pour les époux, à se faire aussi mal qu'ils se font bien l'amour, jusqu'à ce que l'un des deux, touché, soit coulé.
Il revient de loin, ce couple modèle, et qui sait par quel aveuglement il se croit né sous le signe du grand amour. -
Un homme revient sur son enfance - il est peut-être mon double, mon agent le plus secret, J'ai peut-être essayé, avec l'exploration d'un souvenir défiguré par les années, mais aussi régénéré par le roman, de dessiner pour la première fois le visage de ma mère à qui je dois d'aimer autant la vie.
Aime et fais ce que tu veux : tel était son credo sur la fin. Et jour après jour, je puise un certain réconfort dans la pensée d'être son fils et de l'avoir si bien connue. Si bien?...
Y. Q. -
« De ce jour, la vie de Richard Dorval se chargea d'un secret dont il ne put jamais se dépêtrer. Il avait culbuté sa soeur, ce qui n'était pas bien. Il avait aimé la culbuter, ce qui n'était pas bien. Dans le vol Paris-Saigon il s'était promis de recommencer à la première occasion, ce qui n'était pas bien. Une veuve fidèle et pieuse, la mère irréprochable de trois enfants, roulée à trente-six ans comme à dix-huit, pas bien du tout. Ce triple mea culpa se compliqua d'un châtiment naturel quand Albane, enceinte, paniquée, trouva normal de venir là-bas, chez les Moïs, accoucher d'un enfant qu'elle ne voulait ni voir ni jamais se rappeler. Boris, conçu dans une salle de bains versaillaise entre une pelle de plastique rose et une serpillière. Boris, fils d'Albane et de Richard qui s'entendaient comme les doigts de la main. Un peu de champagne, un peu d'eau sur une robe à plumetis un peu sage, et les doigts deviennent fous. Cette grosse blague entre frère et soeur, Boris l'avait prise au sérieux, il avait fait tous les paliers, il était né. »
Versailles, 1968. Boris , sitôt né, sitôt chassé.
Trémazan, 2002. Les Dorval ont toujours belle âme et grande allure. Devenu un vieillard mélancolique, Richard a des idées fixes : retrouver son fils disparu, se débarrasser de sa fortune colossale et porter un dernier coup à la sainte famille, repaire de la filouterie en col blanc. Sa donation entre vifs a de quoi déconcerter le plus rusé de ses héritiers. A l'heure des testaments le maître mot c'est compter, et l'enfant illégitime - un manque à gagner. Les couteaux sont tirés, rien ne va plus. Sur ce, Boris tombe amoureux...
Prix Goncourt 1985 avec Les Noces barbares, Yann Queffélec est l'auteur d'une quinzaine de romans, notamment Le Charme noir, Disparue dans la nuit, La Force d'aimer. -
« Les Affamés sont tous ceux que je fus ou m'imaginais devenir autrefois - gosses rêveurs, menteurs, casse-cou, voyeurs, adolescents violents, trouillards, généreux - trop seuls pour avoir quelque chose à donner ou trop avides pour être attirants. Ils n'obéissent qu'aux lois du désir, ne cherchent que l'amour, la proie, tour à tour innocents, pervers, dépravés. Héros enfantins ils ne seront jamais tout à fait grands ni satisfaits. Avec Les Affamés je revis bien des erreurs que j'ai faites pour ne plus être un insatiable paumé.
Mais la jeunesse - le bel âge à vif - est un climat dont on ne réchappe pas toujours, et dans ce cas une fatalité. »