"Un soir d'hiver de l'année 1840, par un froid noir et mouillé, un pauvre homme entra au poste de la rue Culture-Sainte-Catherine. C'était une bonne figure naïve et un peu étonnée. Il portait un costume bourgeois très râpé, avec un tablier de garçon pharmacien, dont la grande poche bâillait sur son estomac. Dans cette poche, il y avait un paquet assez volumineux, ficelé dans du papier d'emballage.
Il demanda la permission de se chauffer au poêle ; ce qui lui fut volontiers accordé. Le jour s'en allait tombant au-dehors, et dans l'intérieur du corps de garde la nuit était tout à fait venue. On n'avait pas encore allumé le quinquet.
Quand le pauvre homme s'en alla, personne ne s'aperçut qu'il n'y avait plus de paquet dans la poche de son grand tablier.
À quelques pas du corps de garde s'élevait une maison d'assez grand aspect et fermée sur le devant par un mur. On l'appelait l'hôtel Fitz-Roy. Le dernier duc de Clare (celui qui portait le titre de prince de Souzay) l'avait habité un temps avec la princesse sa femme. On disait qu'ils étaient séparés maintenant.
Et la maison restait déserte, au point que, depuis le décès d'un vieux concierge, qui était resté là comme un chien dans sa niche après le départ des maîtres, on n'avait pas vu une seule fois la porte cochère rouler sur ses gonds.
Du haut en bas de l'hôtel, hiver comme été, les contrevents fermés masquaient les croisées, ce qui mettait le quartier en mauvaise humeur. Les marchands d'alentour disaient, non sans raison :
- C'est comme si on avait dans la rue un monument du Père-Lachaise. Qu'ils vendent ou qu'ils louent ! Il y a de quoi mettre là-dedans douze ménages de rentiers ou une fabrique de bronzes, qui ferait aller le commerce.
Ce fut dans une allée étroite et sombre, située vis-à-vis de l'hôtel Fitz-Roy, que se réfugia l'homme au paquet en sortant du corps de garde. Peut-être était-ce tout uniment pour se mettre à l'abri, car la pluie tombait. Nous devons dire pourtant que, dans cette espèce de guérite, il avait plutôt l'air d'un factionnaire qui fait le guet."
8e et dernier opus des "Habits noirs".
Le colonel est mort mais son fantôme plane toujours sur les débris de ce qui fut la formidable organisation criminelle des "Habits noirs" : la "bande Cadet". Où est caché le trésor du colonel ? En attendant de le trouver, il y a un héritage à capter... celui des Fitz-Roy.